Ce jour-là… 24 avril 1990, après 25 ans de règne sans partage, Mobutu annonce, les larmes aux yeux, la fin du parti unique (MPR) et le retour au pluralisme au Zaïre. “Comprenez mon émotion”, restera la phrase phare de cette journée à jamais gravée dans la mémoire des Congolais.
Ce jour-là, en début d’après-midi, à la cité de la N’sele (à Kinshasa), un parterre de ministres, magistrats, généraux et parlementaires est présent. Le maréchal n’est désormais plus que l’ombre de lui-même, reclus de plus en plus dans sa somptueuse demeure de Gbadolite.
Mobutu se présente vêtu d’un uniforme noir de maréchal. Il annoncera qu’il a décidé “seul devant sa conscience” de tenter l’expérience du pluralisme politique au Zaïre, avec à la base le principe de la liberté pour chaque citoyen d’adhérer au parti politique de son choix.
“Que devient le chef dans tout cela?” poursuivra-t-il, de sa voix martiale. “Je vous annonce que je prends ce jour congé du MPR pour lui permettre de se choisir un nouveau chef devant conduire…”. Silence, puis quelques gouttes lacrymales, et “Comprenez mon émotion”.
A cette annonce, la salle applaudit à tout rompre, avant d’entonner avec enthousiasme : “Nous avons confiance en notre guide. Qui est notre guide? Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga ! Libérateur ! Pacificateur ! Unificateur !”
Mobutu ouvrait ainsi les vannes de la démocratisation. Le même soir, les Zaïrois avaient l’autorisation de porter de nouveau des cravates, arborées avec fierté dans les rues de Kin (vêtements interdits du temps de l’État-parti au nom du retour à l’authenticité africaine).
Il faudra tout de même attendre 1997, soit près de 7 ans après le discours du 24 avril 1990, pour que Mobutu finisse par quitter le pouvoir, chassé par la rébellion menée par Laurent-Désiré Kabila, appuyé par les armées rwandaise, ougandaise et burundaise.
(Texte de Benjamin Babunga Watuna)
